Déconcentration de la Gestion des personnels de l'Etat
Ministère de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative
Cameroon

The Problem

Au Cameroun, le Ministère en charge de la Fonction Publique (MINFOPRA) gère plus 165 000 agents publics. Jusqu’en 2001, la gestion desdits personnels était centralisée au niveau de deux ministères : celui en charge de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative, en ce qui concerne les carrières et celui en charge des finances (MINFI) pour ce qui est de l’immatriculation des personnels de l’Etat et de la gestion de leurs soldes. La gestion des carrières s’effectuait manuellement entraînant de nombreux dysfonctionnements, parmi lesquels :

- L’impossibilité de prévoir à quel moment un dossier reçu dans un service pouvait être traité. On pouvait ainsi noter la présence des dossiers qui s’entassaient dans les bureaux. Chaque matin l’on pouvait apercevoir dans les couloirs des usagers qui faisaient la queue devant un bureau attendant d’être reçus par celui qui se devait de traiter leurs dossiers. Très souvent lorsqu’ils étaient reçus, l’argent était échangé contre le service attendu. Parfois des éclats de voix que l’on pouvait suivre du fait de l’insatisfaction de certains usagers qui étaient surpris de l’accueil qui leur était réservé. Lorsque à la fin de la journée, ils se rendent compte que les objectifs poursuivis par leurs déplacements (parfois très difficiles à cause de l’éloignement et des conditions de voyage) n’ont pas été atteints, ils reprenaient le chemin retour, très courroucés et en maudissant ces services qui leur font tant de mal. En fin, l’absentéisme des agents publics de leur poste de travail résultant des déplacements liés au suivi des dossiers au MINFOPRA ou MINFI et de l’insatisfaction qui en découlait.

- Un faible rendement des personnels et des services (environ 4 800 dossiers traités par an) ;

- La non maîtrise des effectifs, matérialisée par les écarts entre les effectifs affichés par le MINFOPRA et ceux payés par le MINFI. Cette situation a donné naissance à un nouveau type d’agents dits fantômes qui percevaient chaque fin du mois des salaires alors qu’ils n’étaient pas personnels de l’Etat. Bien plus, certains agents de l’Etat percevaient des traitements salariaux auxquels ils n’avaient pas droit.

- La non maîtrise de la masse salariale, découlant notamment du manque de liaison directe entre la gestion des carrières et la prise en compte financière. Chaque agent devait déposer l’acte de carrière à effets financiers au MINFI pour sa prise en compte au niveau de la solde. Cette pratique a amené les agents véreux à introduire au niveau de la solde des faux actes de carrière.

Après un constat d’échec de la gestion centralisée et manuelle, l’option de la gestion déconcentrée et informatisée a été retenue. La Réforme engagée poursuit deux objectifs principaux :

- La valorisation de la ressource humaine et de la qualité de service rendu aux usagers ;

- L’amélioration du fonctionnement et de l’efficacité de l’administration afin de maîtriser les effectifs de la fonction publique camerounaise et la masse salariale y relative.

Solution and Key Benefits

 What is the initiative about? (the solution)
Trois changements principaux sont à porter à l’actif de la réforme:

- La responsabilisation des ministères utilisateurs dans la maîtrise des effectifs et de la masse salariale, en leur transférant les compétences y afférentes ;

- L’accroissement du degré de responsabilité et d’imputabilité des chefs de structures en matière de gestion prévisionnelle, des emplois et des compétences;

- Cette réforme n’aurait pu connaître le succès qu’elle remporte aujourd’hui, sans l’opérationnalisation du socle informatique qu’est le Système Informatique de Gestion Intégré des Personnels de l’Etat et de la Solde (SIGIPES). Le SIGIPES permet :
• aux ministères utilisateurs, d’assurer la gestion, la coordination et le suivi des opérations liées à la paie des agents publics, à l’évolution de leur carrière et à la réalisation de leur formation continue ;
• au ministère en charge de la Fonction Publique, de réguler la gestion des ressources humaines et de procéder à une véritable gestion prévisionnelle des effectifs ;
• au ministère en charge des Finances, de jouer entre autres, le rôle de régulateur en matière de gestion de la solde.

Le SIGIPES comporte deux (02) volets : un volet solde et un volet carrière qui communiquent via un protocole permettant le basculement des actes générés par le volet carrière et solde pour prise en compte des effectifs financiers lors du traitement de la solde. Le volet solde est installé au MINFI, alors que celui relatif à la carrière est installé dans vingt six (26) administrations déconcentrées. Les sites sont interconnectés par fibre optique.

Les avantages acquis sont de plusieurs ordres à savoir :

- La réduction considérable des démarches et des déplacements onéreux liés au suivi des dossiers, avec les effets pervers qu’ils entraînaient en termes de corruption ;

- La maîtrise des effectifs et de la masse salariale, grâce d’une part, à la constitution d’un fichier unique et consolidé, d’autre part, au fait que les données issues de la gestion des carrières constituent désormais l’input qui conditionne le paiement des salaires et des avantages salariaux ;

- L’accroissement des performances des agents publics et des services, du fait de la valorisation des personnels et de leur responsabilisation, mais aussi de l’automatisation des opérations qui a permis de passer de 4800 dossiers traités avant le sigipes par an à 34 664 dossiers traités au MINFOPRA en 2009 avec le SIGIPES.

- L’amélioration sensible de la qualité du service par :

• la prise en compte instantanée des mouvements de gestion du personnel ;
• la disponibilité de l’information en temps réel ;
• l’instauration d’un contrôle automatique de qualité et de fiabilité de l’information ;
• l’instauration de la transparence dans le traitement des dossiers, toute l’information utile étant disponible en ligne.

Actors and Stakeholders

 Who proposed the solution, who implemented it and who were the stakeholders?
La réforme a été mise en œuvre progressivement. C’est ainsi que, démarrée en 2001 à titre expérimental dans quatre (04) ministères à gros effectifs, elle se déploie aujourd’hui dans vingt six (26) administrations.

Faisant face aux différentes difficultés que rencontrait le Cameroun dans le cadre de la gestion des agents publics, le gouvernement a pris l’option de déconcentrer la gestion de son personnel afin d’amener chaque administration à gérer la carrière des personnels qu’elle emploie et de payer leur salaire. Ceci dans le but de maîtriser les effectifs de la fonction publique, la masse salariale induite et d’améliorer la qualité de service rendu aux usagers.

Pour encadrer juridiquement ce projet, des équipes constituées des experts de la fonction publique ont été mises en place. Parmi ces équipes, on peut citer :

1. L’équipe opérationnelle coordonnée par le secrétariat permanent à la réforme administration. Son rôle est de définir les différentes actions à mettre en œuvre pour la réussite du projet. Elle est constituée :

a. Du comité des utilisateurs dont le rôle est de définir les différents besoins relatifs à la modernisation de la gestion des personnels de l’Etat et de la validation le cas échéant des solutions mises en œuvre par le comité technique ;
b. Le comité technique dont le rôle est de mettre en œuvres les différentes actions retenues par le comité des utilisateurs et validées par l’équipe de coordination. Lors du lancement du projet, on retrouvait dans ce comite le prestataire de service CGICOM qui développait les différentes solutions informatiques et étaient par la suite validée par les agents publics informaticiens. Mais dès 2005, cette méthode de travail a été revue dans le souci d’une appropriation totale du SIGIPES par l’Etat. C’est ainsi que l’organigramme du MINFOPRA a été modifié pour créer une division informatique qui s’occupe désormais de toutes les tâches de développement des solutions informatiques ;

c. Le comité interface solde-carrière constitué des fonctionnaires informaticiens a pour rôle de mettre en œuvre des solutions informatiques pour permettre les échanges de données entre les deux composants logiciels de la GRH de l’Etat ;

d. Le comité sécurité constitué des fonctionnaires informaticiens est chargé de définir la politique de sécurité à mettre en œuvre.

2. L’équipe de coordination du projet, co-présidée par le ministre en charge de la fonction publique et celui en charge des finances. Elle est chargée de la validation des actions définies par l’équipe opérationnelle et de trouver les moyens (financiers et matériels) nécessaires pour leur mise en œuvre.

(a) Strategies

 Describe how and when the initiative was implemented by answering these questions
 a.      What were the strategies used to implement the initiative? In no more than 500 words, provide a summary of the main objectives and strategies of the initiative, how they were established and by whom.
A l’origine, le principal souci dans la réalisation de ce projet résidait dans sa maîtrise, son appropriation et son extension.

Dans cette perspective, le déploiement du SIGIPES dans les sites pilotes a constitué la première étape du projet.

En effet, la stratégie retenue dans le cadre de ce projet a consisté à partir d’un ensemble réduit de sites dits pilotes, lesquels devraient permettre de démarrer l’opération, de l’éprouver afin d’identifier tous les obstacles et problèmes susceptibles d’être rencontrés aux plans matériel et humain.

A ce sujet, au plan matériel, les sites pilotes ont permis d’expérimenter un certain nombre de solutions informatiques et de communication des données. A titre d’exemple, du simple système radio utilisé pour la communication, nous sommes rendus aujourd’hui à l’ère de la fibre optique.

En ce qui concerne les solutions informatiques, les sites pilotes ont constitué une espèce de laboratoire ayant permis d’éprouver le système et expérimenter le traitement automatisé des actes de carrière.

Sur le plan humain, le fonctionnement des sites pilotes a permis de constater les besoins en formation des personnels utilisateurs, et de trouver des solutions pour y remédier.

Une fois les ajustements effectués (2ème étape), la troisième étape a consisté à transposer progressivement les résultats obtenus aux autres administrations.

L’extension du projet dans tous les autres services centraux des départements ministériels a constitué la première étape du processus de déconcentration de cette reforme à grande échelle. Celle-ci est appelée à se poursuivre dans les services déconcentrés de différents départements ministériels et constitue de ce fait un précieux accompagnement du processus de décentralisation en cours au Cameroun. Ici également, le processus devra être progressif.

En somme, la reforme est appelée à s’opérationnaliser de manière progressive, à travers:

- La prise des mesures correctives et d’ajustements rendues nécessaires par l’exploitation des sites pilotes ;
- L’extension de la reforme dans tous les services centraux des départements ministériels ;
- Le déploiement de SIGIPES dans tous les services déconcentrés des Administrations publiques.

(b) Implementation

 b.      What were the key development and implementation steps and the chronology? No more than 500 words
- Signature en 2000 du premier contrat avec le prestataire CGICOM pour l’opérationnalisation du SIGIPES ;
- Création et mise en place des différents comités et équipes sus évoqués en 2001 ;

- Création dans toutes les administrations publiques camerounaises des cellules chargées de la gestion du projet SIGIPES ;

- Déploiement, en 2001, du SIGIPES dans 04 administrations à gros effectifs pour éprouver le système ;

- Signature en 2002 et en 2003 des contrats de maintenance avec le prestataire CGICOM ;
- Création en 2005 de la Division Informatique au MINFOPRA pour l’appropriation du SIGIPES et sa maintenance ;
- Création en 2005, des comités ad hoc chargé de l’assainissement des fichiers soldes et personnels de l’Etat dans chaque administration comme préalable au transfert des compétences relatives à la déconcentration ;

- Extension du SIGIPES dans les 22 autres administrations en 2007 avec pose de la fibre optique pour interconnecter les 26 administrations abritant le SIGIPES ;

- Création en 2007 du portail d’information http://dossier.minfopra.gov.cm/ permettant le suivi en ligne des dossiers traités dans le SIGIPES;

- Recrutement de 421 informaticiens pour le suivi du SIGIPES dans les administrations.

(c) Overcoming Obstacles

 c.      What were the main obstacles encountered? How were they overcome? No more than 500 words
La principale difficulté rencontrée fut l’appropriation du SIGPES par l’Etat. En fait les consultants travaillant pour le compte du prestataire qui avait la charge de développer les solutions informatiques retenues étaient les seuls à avoir une maîtrise technique de l’outil. Ce qui a engendré de fortes dépenses liées aux paiements de leurs prestations. Ainsi toute la maintenance corrective et évolutive était assurée par ledit prestataire qui avait gardé par devers lui toutes la documentation technique SIGIPES. Pour y faire face, le gouvernement camerounais a d’une part contraint CGICOM, en 2005, à rétrocéder sans condition toute la documentation liée au SIGIPES, et d’autre part, créé une division Informatique au MINFOPRA qui devait continuer le travail effectué par ledit prestataire.

La deuxième difficulté était liée au choix technologique. Dans le cadre de l’échange des données entre les différentes administrations, la technologie radio avait été choisie, cette solution s’est vite avérée inefficace du fait de l’instabilité de la liaison du pour l’essentiel aux vents violents qui désorientaient les antennes. A chaque fois des équipes étaient mobilisées pour rétablir la liaison. Pour y faire face, et dans le cadre de l’extension du SIGIPES dans toutes les administrations publiques camerounaises, le gouvernement a procédé au remplacement de la technologie radio par la fibre optique. A ce jour, 26 administrations abritant le SIGIPES sont interconnectées par la fibre optique.

La troisième difficulté était liée à la résistance au changement. Le déploiement du SIGIPES ayant instauré la transparence dans le traitement des dossiers et éliminé de manière substantielle la corruption, les agents publics intervenant dans la chaîne de traitement ont tardé à suivre l’évolution du fait qu’ils ne pouvaient plus bénéficier des avantages liés au suivi du traitement des dossiers par les usagers. Pour y faire face, le gouvernement a entrepris une campagne de sensibilisation afin de conscientiser les utilisateurs du sigipes.

La quatrième difficulté était liée à l’intégration des actes de carrière des agents publics signés hors SIGIPES. Pour y remédier, un composant d’archivage électronique a été développé par les experts de l’administration et intégré dans le SIGIPES. Le processus de numérisation desdits actes est en cours.

(d) Use of Resources

 d.      What resources were used for the initiative and what were its key benefits? In no more than 500 words, specify what were the financial, technical and human resources’ costs associated with this initiative. Describe how resources were mobilized
a. Le gouvernement camerounais a signé, de 2000 à 2003, trois contrats avec le prestataire CGICOM pour un montant total de 756 802 712 francs CFA portant sur l’opérationnalisation du GIGIPES son déploiement dans quatre administrations devant servir d’éprouver le système avant toute extension dans toues les administrations ;

b. Pendant la phase de rétrocession des documents techniques à l’Etat, un comité de stabilisation est créé et regroupait en son sein des étudiants stagiaires informaticiens qui seront par la suite recrutés par l’administration pour travailler dans le projet SIGIPES ;

c. Après avoir éprouvé le SIGIPES dans 04 administrations, le gouvernement a procédé à son extension dans 22 autres administrations et a signé par la même occasion des contrats avec des prestataires pour réaliser l’interconnexion des 26 administrations à l’aide de la fibre optique pour un coût total de 776 886 500 francs CFA et l’acquisition des équipements (serveurs, postes de travail, licences oracles et Windows, PCOM) pour un coût global de 737 340 483 francs CFA, et la mise en place des réseaux locaux dans chacune des ces administrations pour un coût global de 318 756 426 francs CFA, le recrutement d’un cabinet de contrôle pour un montant de 146 000 000 francs CFA.

d. Le SIGIPES ayant été déployé dans 26 administrations et compte tenu du manque du personnel informaticien dans l’administration publique camerounaise pouvant jouer le rôle de support aux utilisateurs et en prélude à son extension dans les 14 administrations restantes, le gouvernement a recruté 421 informaticiens tous grades confondus en 2009, qui ont été repartis dans toutes les administrations publiques camerounaises.

Sustainability and Transferability

  Is the initiative sustainable and transferable?
L’Etat camerounais compte pérenniser le projet SIGIPES dans le cadre de la maîtrise des effectifs des agents publics et de sa masse salariale. Ceci constitue une préoccupation permanente des pouvoirs publics que le projet est appelé à résoudre de manière durable et pérenne. Avec son appropriation par l’Etat, son coût de maintenance corrective et évolutive se réduit pour l’essentiel à la maintenance des équipements, et à la formation continue des différents intervenants dans le SIGIPES.

Au plan social, culturel et économique, l’information a été rapprochée de l’usager du service public par l’entremise d’Internet et de la déconcentration de la gestion, ce qui participe à la vulgarisation de la culture informatique ayant pour corollaire la limitation des déplacements, concourrant ainsi à la lutte contre la corruption, à la réalisation des économies des dépenses liées aux différents déplacements des usagers. De plus, le SIGIPES permet de lutter efficacement contre le phénomène autrefois rempant des agents publics fictifs, des faux actes de carrière, et de la perception indue des éléments de rémunération y afférents;

Au plan institutionnel et réglementaire, toutes les administrations publiques camerounaises ont chacune un service en charge du SIGIPES permettant de maîtriser les effectifs des agents publics y travaillant et la masse salariale y relative. C’est dire que le SIGIPES fait désormais partie du fonctionnement de la fonction publique camerounaise en ce qui concerne la gestion des ressources humaines et de la solde.

Le projet SIGIPES est transférable à tous les pays africains qui rencontrent des difficultés similaires dans le cadre de la maîtrise des effectifs et de la masse salariale. En 2006, après le séminaire organisé au Cameroun par le Centre Africain de Formation et de Recherche Administratives pour le Développement (CAFRAD), le MINFOPRA a été approché par les représentants de certains pays à l’instar de la République de Madagascar à l’effet de s’inspirer de notre expérience en la matière.

Lessons Learned

 What are the impact of your initiative and the lessons learned?
Le projet de la déconcentration de la gestion des personnels de l’Etat tient son succès à:

a. la manière dont il a été organisé par équipes et comités pour un meilleur suivi ;

b. sa stratégie de mise en œuvre qui a consisté à identifier les administrations devant servir de test de la réforme avant toute extension ;

c. la volonté politique qui a permis de mettre à disposition tous les moyens sollicités dans le cadre de ce projet, et d’en assurer l’impulsion;

d. L’engouement que le projet a finalement suscité auprès des agents et des administrations publics.

Contact Information

Institution Name:   Ministère de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative
Institution Type:   Government Department  
Contact Person:   Philip Ngole Ngwese
Title:   Sectrétaire Général du ministère  
Telephone/ Fax:   77708182
Institution's / Project's Website:   22230800
E-mail:   pnngole@yahoo.com  
Address:   Ministère de la Fonction publique, Cameroun
Postal Code:   237
City:   Yaoundé
State/Province:   Centre
Country:   Cameroon

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